La place et le leadership de la DSI dans l'organisation pour innover. Si l'on considère que le processus métier deviendra de plus en plus digital dans la majorité des industries, c’est à dire que la place de l’intervention humaine tend à diminuer, il semble naturel de penser que la DSI devrait être au cœur de la stratégie et de l'évolution des processus.
L'innovation est-elle si indispensable aujourd'hui ?
Face à la complexité grandissante du monde et aux défis à relever par les organisations pour évoluer et s’adapter, l'innovation risque d'être encore pour longtemps notre seule voie de survie. Consensus sur ce point.
Pensez-vous que l'innovation soit dans l'ADN de votre entreprise ?
Pratiquement aucun DSI n'a répondu positivement à cette question. Et tous semblent convaincus que la présence d'un "Patron de l'innovation" lorsqu’il y en a un, est bien le signe du contraire. Car l'innovation est avant tout une culture, une posture qui doit être portée par tous, à tous les niveaux. Elle devrait être un réflexe naturel d'amélioration (d'un processus, d'une expérience etc.) et irriguer toutes les fonctions de l'entreprise de la stratégie au processus de fabrication.
L'innovation peut-elle être dangereuse ?
Tous les DSI présents ont vécu (plus ou moins récemment) la situation suivante : le métier ou le CDO fait rêver le Comex avec une innovation qui se révèle pratiquement impossible à déployer par la DSI dans des délais raisonnables.
Une source globale de frustration pour tous qui a tendance à stigmatiser nos chers informaticiens. Alors comment éviter ce biais ? Faire collaborer plus en amont l'ensemble de la chaîne de valeur de l'innovation est une priorité, à l'instar de ce qui se fait dans une startup ou dans l'industrie.
Finalement il y a assez peu d'innovation produit ?
Si l'on regarde dans le rétroviseur (et cela semble vrai autant dans l'assurance que dans la banque), on observe que les innovations sont plus centrées sur l'expérience client (néo banque, Alan, Luko, etc …) que sur le produit. Cependant, on peut nuancer cette analyse par l'innovation de modèles économiques. Par exemple, passer de la vente de pneu à la vente de kilomètres ne change rien au sous-jacent (le pneu) mais change tout le reste.
Le digital c'est compliqué ?
Les DSI doivent faire preuve de beaucoup de pédagogie pour faire comprendre les enjeux technologiques de leur direction aux DG et aux directions métiers. Comprendre la proposition de valeurs du Cloud est simple mais en comprendre les impacts et les difficultés d'implémentation est plus compliqué. Quid de la blockchain, du metaverse ou simplement de l'IA. Cette nécessaire pédagogie rendue possible par un travail de co-conception permanente, permettra d'augmenter radicalement la valeur de l'innovation en provenance de la DSI.
Les questions à creuser
Disposons-nous d’une marge de manoeuvre suffisante ?
"Non" est la réponse naturelle qui émerge, rapidement challengée et nuancée. Challengée en rappelant Jugaad, rendue célèbre par Navi Radjou dans son best-seller éponyme et consistant à résoudre des problèmes complexes à l'aide de ressources limitées. L’auteur prouve par l’exemple que la contrainte est un formidable accélérateur de créativité.
Nuancée aussi, car tout dépend de la structure, de sa taille et de culture. Au fond, les marges de manoeuvre existent toujours, reste à les trouver.
Les problèmes sont-ils les mêmes dans les services et dans l'industrie ?
Difficile de répondre à cette question tant la place de la DSI dans l'industrie est particulière et beaucoup plus distante des métiers que son homologue dans la banque ou l'assurance.
Le DSI peut-il et doit-il devenir DG ?
Deux obédiences s'affrontent. La première, favorable à "chacun son rôle" dans l'équipe, argue que faire tourner l'entreprise n'est pas le savoir-faire ou la vocation du DSI. L’autre insiste sur le fait que les enjeux digitaux sont aujourd'hui présents à tous les niveaux de l'entreprise et que c'est bien le métier du DSI que de comprendre les métiers qu'il sert. On observe de fait beaucoup d'évolution dans ce sens, de DSI devenant DG.
L'innovation coûte-elle plus cher qu'elle ne rapporte ?
Les participants soulignent que l'innovation consomme des budgets parfois "gargantuesques" pour des résultats parfois médiocres. Là où de vieilles chaînes de calculs écrites dans de vieux langages fonctionnent parfaitement sans jamais tomber en panne. Difficile de contrer cet argument factuel. Toutefois il peut être nuancé en observant que la majorité des dix premières capitalisations boursières au monde sont issues du monde numérique. Et rares sont les artistes qui font une oeuvre d'art parfaite du premier coup ...
Quelles sont les entreprises très innovantes qui vous viennent spontanément à l'esprit ?
- Valeo (conduite autonome)
- Amazone (simplicité des parcours)
- Apple (tout)
- L'Oreal (usines innovantes)
- Luko (transparence parcours client)
- Stripe (simplicité paiement)
- Space X (réutilisation du lanceur)
- Tesla (techno)
- Netflix (usage et management)
Aucune entreprise française .... Pourquoi, selon vous ?
Conclusion
Au fond c'est bien l'organisation et sa verticalité qui bride l'envie et la capacité à collaborer et donc appauvrit la capacité d'innovation de l'entreprise et de la DSI. Les méthodes existent (design, lean start up, agilité etc.), et permettent à l'échelle d'un projet de s'affranchir de cette verticalité mais sont encore difficiles à déployer dans l'ensemble de l'organisation