Distanciel : Se dit d’un enseignement ou, par extension, d’un travail qui s’effectue à distance et non sur place (Larousse). À opposer à présentiel. Cela fait quelques années que ces mots font partie du quotidien de la plupart d’entre nous [1].
Agilité et Distanciel vous paraissent antinomiques ? Je me souviens de coachs ou de Scrum Masters qui ne juraient que par la colocalisation, jugeant toute alternative comme hérétique et vouée à l’échec. Le Covid, et les confinements qui ont suivi, sont venus battre en brèche la plupart de ces nobles convictions. Et la généralisation de la montée à l’échelle, impliquant de faire travailler ensemble des équipes distribuées géographiquement, ont achevé celles qui subsistaient. Sans compter que le télétravail rencontre un franc succès chez de nombreux salariés [10] et que cette tendance ne semble pas vouloir se démentir.
“Home is where I work, and I work everywhere.” Alfred Nobel
Il est donc nécessaire de s’adapter, mais c’est tout sauf simple : l’Agilité c’est (entre autres choses) des interactions entre des individus, de préférence en face-à-face [2]. La communication passe par la voix, mais aussi par le langage corporel et l’image [3]. Or en distanciel, le langage corporel est - au mieux - très largement réduit ou dégradé, et les supports visuels négligés ou peu adaptés. Logiquement les pratiques Agiles en souffrent.
Alors, comment être pleinement Agile, même en distanciel ? Et même mieux : ne pouvons nous pas y trouver quelques avantages ? C’est ce que je vous invite à découvrir dans cette série de 3 articles intitulée “Maitrisez l'Agilité en distanciel”. Intéressons nous d’abord aux principes de base (dont la plupart sont d’ailleurs applicables dans des contextes non Agiles).
☝ Cet article est à l’origine un mémo que j’avais adressé à mes collègues du Cercle Agile à l’issue du premier confinement. Pour nous coachs Agiles et Scrum Masters (du moins ceux qui étaient toujours en poste chez leur client, car la période a été compliquée pour des profils tels que les nôtres…), la pratique de l’Agilité en distanciel n’était pas chose commune. Le travail à distance, avec la généralisation du télétravail, et la multiplication des environnements multi-localisés, s’est depuis largement étendu, au point qu’en faire un article en bonne et due forme s’en trouve à mon avis justifié.
Le son
“You’re on mute.” Anonyme
La qualité sonore est primordiale ! Utilisez de préférence casque et micro, limitez les bruits de fond autant que possible (des options sont disponibles sur la plupart des casques), cela évitera les demandes de répétition – et les pertes de temps associées – ou pire, les incompréhensions. En effet en distanciel, les participants seront encore plus réticents à exprimer leurs doutes ou leurs questions qu’en présentiel, et ce d’autant plus qu’ils sont nombreux. Et vous savez que de petites incompréhensions peuvent avoir de lourdes conséquences par la suite… Globalement, privilégiez les phrases courtes (contrairement à moi dans cet article !), un vocabulaire simple et prenez garde à ar-ti-cu-ler.
N’oubliez pas les conjonctions de coordination (mais-ou-et-donc-or-ni-car) : elles structurent le propos et facilitent la compréhension des interlocuteurs. Souvent implicites en présentiel, par le ton ou par le langage corporel (et même parfois par de grands gestes évocateurs), en distanciel il convient de les formaliser explicitement.
⚠️ Prudence avec l’humour, terrain miné ! Déjà en face-à-face, il peut être diversement reçu, on en a certainement tous fait l’expérience. Mais en distanciel, c’est encore plus risqué. Au mieux, votre trait d’humour tombera à plat. Au pire… il sera mal compris et perçu comme insultant - ce dont vous ne vous rendrez probablement d’ailleurs même pas compte du fait précisément des limites du distanciel. C’est évidemment encore plus risqué dans des environnements multinationaux, du fait d’une moindre maitrise de la langue par certains participants, ou de spécificités culturelles ou historiques particulières.
Et les émotions ? Elles ne sont pas absentes de nos réunions professionnelles, bien au contraire. Elles sont même tout à fait nécessaires - ne serait-ce que pour garder vos interlocuteurs éveillés et attentifs. Elles aussi passent naturellement beaucoup (surtout ?) par le langage corporel. Que faire alors ? Si vous vous sentez une âme d’acteur, exagérez vos émotions, éclatez de rire, grondez, lamentez-vous bruyamment, trépignez sur votre chaise (mais soyez prudent tout de même avec certaines émotions, telles que la colère…). Pour les autres, faites-vous poètes : exprimez simplement vos émotions avec des mots.
⚠️ Et quand on s’exprime dans une langue qui n’est pas la nôtre, qu’on ne maitrise souvent donc pas parfaitement, c’est encore plus compliqué ! Les mêmes précautions sont valables, mais doivent être appliquées avec encore plus de rigueur. De plus, laissez-moi vous partager les conseils de quelques proches anglophones, pour nous Français qui nous exprimons en anglais : à moins de parfaitement maitriser la prononciation (et c’est très rare), assumons pleinement notre accent ! Parler lentement et distinctement, en articulant soigneusement, sera toujours préférable aux tentatives de prononciation approximatives ou erronées, qui seront plus déroutantes encore pour l’auditeur. Et n’oubliez pas que les anglophones affectionnent les phrases courtes et simples : sujet-verbe-complément.
La vidéo
Spontanément, on considérera que la vidéo est la bienvenue pour soulager les déficits de communication verbale et vocale. Oui, certainement, mais en partie seulement. Et selon moi le gain de la vidéo est même assez marginal. Voici pourquoi :
- La qualité encore souvent très relative et la fluidité parfois défaillante : en 2023, 80% des salariés français affirment avoir perdu du temps dans leurs réunions hybrides en raison de difficultés techniques [14].
- La taille réduite des vignettes vidéo, sur petit écran et/ou quand le nombre de participants augmente.
- Le cadrage partiel (sur le visage et le haut du corps) et parfois l’angle de vue, donnant à voir un profil ou un trois-quarts.
- Spontanément, on se concentre plutôt sur celui qui s’exprime, plus encore qu’en présentiel, du fait d’une vignette mise en avant par défaut, ou par la dégradation de la qualité sonore, obligeant à se concentrer davantage. Or il est souvent tout aussi intéressant (sinon bien plus intéressant quand on est un coach Agile !) de voir ceux qui ne s’expriment pas. Certes il est possible suivant le système utilisé d’épingler tel ou tel participant, même s’il ne s’exprime pas, mais l’exercice est malaisé - tout au moins il est moins naturel et réactif quand dans un échange en présentiel, il suffirait de jeter de brefs coups d’œil vers l’assistance.
- Enfin, je suis convaincu qu’inconsciemment, on ne se comporte pas de la même façon devant une webcam, que devant une véritable personne : pour vous en convaincre, pensez au syndrome de Chandler [4].
Chandler Bing ne peut s’empêcher de grimacer dès lors qu’il doit poser pour une photo. Friends, épisode 5 de la saison 7
Par ailleurs, les organisations peuvent expressément demander à ne pas activer les vidéos pour soulager réseau et VPN, ou pour faire des économies. En effet la vidéo augmente significativement le volume de données échangé : le simple fait de couper votre caméra le réduirait de 93% [16]. Qui dit réduction des flux de données, dit économie d’énergie, ce qui lorsqu’elle est d’origine carbonée, implique un impact environnemental positif [5]. Vous l’avez compris : pensez à la planète, coupez la caméra et travaillez en slip !
Bien souvent en réalité, j’observe que les interlocuteurs n’activent pas spontanément leurs caméras, ou rechignent à le faire si cela leur est demandé. Si les managers suspicieux imaginent volontiers toutes sortes de raisons moins défendables les unes que les autres pour l’expliquer [6], cela peut être causé aussi très simplement par de la timidité, de la pudeur face à la perception d’une intrusion dans un espace intime et personnel (le domicile, une chambre, la possibilité de l’apparition d’un tiers…) ou une façon de ne pas se soumettre à une forme de pression et de contrôle (ou perçue comme telle).
Extrait de l’étude “The Challenges of Hybrid Work” menée par Vyopta (2022)
Les supports visuels
À la différence de la vidéo, le support visuel, lui, est essentiel. Il aide à capter puis à conserver l’attention de l’assistance - et c’est là un véritable défi en distanciel. Il permet d’aligner tout le monde sur les enjeux et l’objet de la réunion. De mon point de vue (unpopular opinion !) le bon vieux support Powerpoint répond très bien à la problématique. Encore faut-il soigneusement penser forme et fond pour servir au mieux le message que l’on veut faire passer – mais ce n’est le sujet ici. Quoiqu’il arrive, illustrer son propos en partageant des visuels lors de la réunion, pour le compléter ou l’enrichir, est indispensable : cela palliera aux limites des communications verbales et vocales inhérentes au distanciel. Et optimisera vos vidéoconférences : la qualité de l’information communiquée rapportée au temps investi. Cela implique une attention supplémentaire en amont, donc : du temps de préparation.
“Une image vaut mille mots” Proverbe attribué à Confucius, philosophe chinois du 6ème siècle av. J.-C.
En l’absence de tableau blanc, si vous voulez interagir avec vos interlocuteurs - voir même pourquoi pas tenter de faire jaillir l’intelligence collective de vos réunions Teams ! - de nombreux outils, très performants et simples d’usage, répondent au besoin : Miro [7] ou Klaxoon [8] par exemple. S’ils sont relativement faciles à prendre en main pour les participants, le facilitateur devra lui y investir quelques heures de pratique. En effet, vous aurez vite fait de perdre l’attention de votre audience s’il vous faut plusieurs minutes pour péniblement relier deux cercles par une flèche bidirectionnelle ! L’expérience doit être fluide avant tout : ici encore, préparez en avance, simulez, expérimentez.
💡Astuce : à défaut d’outil de collaboration visuelle moderne et adapté, un document Word, ou autre Powerpoint, partagé sur le Cloud peut faire l’affaire, même si l’expérience sera bien moins fluide.
Le format des échanges
De fait, les réunions en distanciel où chacun ne peut s’appuyer que sur la voix de l’autre, éventuellement accompagnée d’un support visuel, sont plus fatigantes, car elles impliquent une attention et une concentration accrue des participants : la part de communication non verbale se réduisant, on intensifie naturellement la communication verbale [15]. Même avec l’usage de supports visuels adaptés, il est nécessaire de privilégier les formats courts avec des objectifs limités mais précis. Réduisez la durée des échanges, quitte à en augmenter la fréquence : pour ma part, je mise peu d’espoir sur les réunions de plus d’une heure, et je m’efforce de construire des formats en 30-45 minutes [11]. S’il n’est pas possible de réduire la durée, ménagez des pauses.
Simple à mettre en œuvre, le format du Lean Coffee permet de structurer les échanges pour en optimiser les bénéfices tout en contrôlant le timing.
Vient la question de la répartition de la parole. En présentiel, c’est naturel (quoique….) : une respiration, une brève pause, un coup d’œil interrogatif vers un locuteur constituent des opportunités implicites pour les autres participants de renchérir, ou de poser une question. Mais à distance surviendra immanquablement le fameux blanc : personne ne sait s’il doit ou non prendre la parole. Certains voudront le combler à tout prix, quitte à faire du hors-sujet ou à diverger. Les plus nombreux resteront silencieux, par timidité ou de peur de couper tel ou tel qu’il imagine s’apprêter à parler. Rien de tout à fait nouveau ici, mais cela sera exacerbé par le distanciel. Comment procéder alors ? Aux questions ouvertes :
- ”Que pensez-vous de … ?”
- “Est-ce que l’un d’entre vous a quelque chose à ajouter ?”
… qui débouchent dans 99% des cas sur un loooonnnng blanc - préférez une question fermée :
- Est-ce que l’un d’entre vous est en désaccord avec… ?”
Lorsque la question fermée ne s’applique décidemment pas, aidez-vous d’un support interactif : donnez-leur quelques minutes pour jeter leurs suggestions ou remarques sur un board Miro, ou plus simple organisez un mini sondage dans la conversation adossée à la réunion. Le cas échéant, faites un tour de table en demandant nommément à chacun de s’exprimer : des remarques surgiront comme par magie - parfois même sur un sujet qui avait été évoqué 30 minutes plus tôt…
☝ L’aisance et la confiance grandissant, certains des plus extravertis n’hésiteront bientôt plus à prendre la parole, poussant dans l’ombre les plus discrets. La plupart des outils de communication proposent une fonctionnalité permettant de demander la parole (habituellement un doigt levé). Faites-en alors une règle d’usage, et assurez vous de distribuer la parole de façon équitable.
Enfin, le nombre de participants a son importance. Lorsqu’il s’agit d’une conversation entre deux interlocuteurs, il n’y a guère de difficulté : c’est un format auquel on est tous habitués depuis longtemps. Même les moins jeunes d’entre nous ont pratiqué les bonnes vieilles conversations téléphoniques : lorsque l’un des interlocuteurs a fini de parler, l’autre prend assez naturellement la suite [19]. Au delà de deux participants, ça se corse. Rappelons que la dynamique et la fluidité des échanges sont essentiels, car sinon chacun aura vite fait de retourner à ses emails ou à d’autres occupations. C’est d’ailleurs parfois déjà le cas dans des réunions physiques ou chacun reste concentré sur son ordinateur - mais c’est un autre combat ! Désigner un animateur (on aime parler de facilitateur, à défaut c’est le Scrum master) semble indispensable afin de distribuer la parole, de s’assurer que chacun puisse s’exprimer dans les meilleures conditions et de surveiller agenda et timing. Au-delà d’un certain nombre de participants, et lorsqu’il s’agit de les faire collaborer ensemble, des fonctionnalités sont généralement disponibles qui permettent de diviser l’assistance en sous-groupes [9].
💡 « Pass the ball » est une technique de distribution dynamique de la parole, que j’affectionne particulièrement, et qui a aussi pour avantage d’impliquer les acteurs. Lorsque vous demandez à chacun de s’exprimer (dans le cadre d’une table ronde par exemple, ou d’un daily scrum), confiez au locuteur le soin de désigner celui qui prendra la parole à sa suite. Bien sûr, il ne lui faudra pas désigner deux fois la même personne, ce qui exige donc de chacun une attention minimale sur l’ensemble du rituel.
Une alternative simple et efficace : une roue de la fortune, avec les noms des participants (ici l’app Miro Spinny Picker Wheel, qui propose une fonctionnalité permettant de retirer successivement ceux qui se sont vus désignés - pratique !)
Les échanges informels
“There is nothing more important in a group remote project than casual communication. Not just official emails and work updates, but the ability to sit back and chat.” David Rabin
En présentiel, lever la tête et poser une question à son voisin de bench est parfaitement naturel : un coup d’œil suffit à voir s’il est profondément concentré sur une tâche. Inconsciemment, nous considérons qu’il est préférable de remettre notre question à plus tard, ou à utiliser un vecteur moins intrusif, email ou autre. En distanciel, c’est bien sûr moins évident. Il est pourtant primordial de permettre ces questions/réponses rapides tant elles sont essentielles à la dynamique de l’équipe - tant d’ailleurs pour des questions de productivité et de performance, que simplement d’ambiance et d’esprit collectif [17].
Et au fait, que deviennent les ragots en distanciel ?
Il est certes possible à chacun dans la plupart des systèmes de définir son statut, ou son indicateur de présence (occupé, disponible…), y compris de façon semi-automatique, mais cela s’avère à l’usage à mon avis peu pertinent, car pas tenu à jour assez finement. Il n’est pas rare que certains fassent un usage immodéré du statut occupé - même si parfois pour de très bonnes raisons. Or quel que soit son métier, même si on effectue des tâches qui demandent une certaine concentration, il est nécessaire de se coordonner avec les autres membres de son équipe. Mieux vaut faire un usage large et circonstancié de tous les canaux disponibles, qu’ils soient synchrones (les réunions planifiées) ou asynchrones (chat, email, commentaires…). Gardez en tête que le travail à distance favorise les communications asynchrones, plutôt que synchrones [18]. Quoiqu’il en soit, chaque canal est adapté à des typologies de communications précises, et appellent à une réactivité variée. Anticipez les conflits (« untel me sollicite 10 fois par jour au mauvais moment ») en établissant collectivement des règles - des working agreements - et en rappelant l’intérêt de ces échanges.
“Email is familiar. It’s comfortable. It’s easy to use. But it might just be the biggest killer of time and productivity in the office today.” Ryan Holmes, fondateur et CEO de Hootsuite
Autre exemple, l’un des membres d’une équipe que j’ai accompagné, plus particulièrement responsable des déploiements applicatifs dans les environnements de qualification ou de production, a pris l’initiative, les jours prévus de livraison, de réserver de larges plages horaires auxquelles ses collègues sont conviés. Ils ne sont pas expressément tenus de rejoindre la réunion spontanément, comme lors d’un rituel Agile classique,. Mais il est convenu qu’ils sont susceptibles d’être sollicité pendant ces laps de temps, par exemple pour livrer un composant ou pour aider en cas de difficulté imprévue. Ce principe pourrait être étendu à d’autres événements du même ordre : présentation client, pic d’activité, opération de maintenance sensible sur un système en dépendance…
💡J’ai vu fonctionner il y a quelques années un système de bureau virtuel tout intégré proposé par LifeSize, où chacun branchait sa webcam non-stop, les images de ses collègues proches se projetant sur un écran dédié, leurs voix dans des haut-parleurs, recréant ainsi l’ambiance visuelle et sonore d’un bench [20]. Le coût, et peut-être une forme perçue comme trop intrusive, n’ont pas permis à ce type de système de se généraliser. Par contre, des solutions de virtual offices à la fois moins coûteuses, plus simples à mettre en œuvre et moins intrusives, reprenant le principe d’un metaverse, se développent. J’ai pour ma part une petite préférence pour gather.town, avec son style pixel art inspiré des jeux vidéos des 80s [21].
Extrait d’une conversation spontanée entre 2 collègues dans gather.town.
Quid du format mixte ?
Un cas de figure classique, c’est lorsque une partie de l’équipe ou de l’assistance est sur site, et peut donc interagir en présentiel, et l’autre est à distance. Près de 8 travailleurs français sur 10 (76 %) déclaraient en 2023 que leurs réunions comptent au moins un participant à distance [14]. Même si la culture Agile traditionnelle pousse au présentiel, le présentant souvent comme un prérequis à la vraie Agilité, il est préférable selon moi de s’attacher à mettre chacun sur un pied d’égalité. Par exemple lorsqu’une équipe est dispatchée sur plusieurs sites, avoir une partie de l’équipe en présentiel dans une salle et l’autre partie en distanciel sur leur propres postes devant Skype - ou pire dans une autre salle, elle aussi en mode visio-conférence - est terriblement contre-productif. La qualité des échanges des personnes en présentiel, du fait du naturel et des facilités de communication que cela implique, sera en complet décalage avec ceux à distance, qui seront par la force des choses partiellement exclus de la conversation. De plus la qualité sonore moindre sur un équipement de type pieuvre, le fait que les gens s’interrompent volontiers les uns sur les autres, ou parlent par dessus les autres, ou font usage d’expressions et de gestes… tous ces éléments nuisent considérablement à la compréhension de ceux restés à distance. La règle que je me fixe : si un seul des participants ne peut être présent physiquement alors c’est très simple, tout le monde se connecte depuis son poste avec son casque ! La qualité globale des échanges y gagnera ce que les injonctions au présentiel y perdront (certes je reconnais que la vision de plusieurs participants à la même réunion virtuelle, s’interpellant à distance d’un bout à l’autre du même open space, peut être quelque peu déroutante et prêter à sourire).
Conclusion
Merci de votre attention ! Prochain article de cette série "Maitrisez l'Agilité en distanciel” : nous nous intéresserons aux rituels Agiles classiques en distanciel (Sprint Planning, Daily Scrum etc). A bientôt !
Références
[1] Distanciel, comme son antonyme tout aussi usité présentiel… quels affreux anglicismes sont-ce là, comme s’en lamente le Figaro : https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/presentiel-distanciel-ces-anglicismes-qui-polluent-notre-langue-20201116#:~:text=Le mot «distanciel» est apparu,enseignement à distance (CNED). Mais nous en ferons tout de même lâchement usage, au nom du confort de lecture, et de la conviction qu’une langue, pour ne pas mourir, doit vivre et évoluer avec son temps. D’ailleurs, je ne me suis pas privé d’en user de nombreux autres ailleurs dans l’article.
[2] Agile Manifesto (2001), voir la première valeur “Individuals and interactions over processes and tools” et le principe “The most efficient and effective method of conveying information to and within a development team is face-to-face conversation." : https://agilemanifesto.org/.
[3] Albert Mehrabian (1967) a établi la règle des trois V : les mots et leur sens représente pour 7% de la communication, la voix et le ton pour 38 % et l’image pour 55 % ; 93 % de la communication serait ainsi non verbale.
[4] Ce n’est pas très scientifique, mais je suis certain que cela parlera à tous : on peut être parfaitement à l’aise et naturel dans des interactions en face-à-face, mais dés lors que l’on pose devant un appareil photo ou une caméra, certains d’entre nous ne savent plus comment se tenir ou sourire sans grimacer de façon ridicule. C’est ce qui arrivait à ce pauvre Chandler dans l’épisode 5 de la saison 7 de Friends : https://www.youtube.com/watch?v=GIxMAgxl9WM.
[5] Kelley Travers du MIT affirme en 2021 que désactiver la video lors d’une vidéoconférence réduit de 96% l’empreinte carbone de la réunion : https://news.mit.edu/2021/how-to-reduce-environmental-impact-next-virtual-meeting-0304.
[6] Etude The Challenges of Hybrid Work par Vyopta (2022) : https://go.vyopta.com/vyopta_wakefield_survey_22.
[7] Miro est une plateforme de collaboration numérique conçue pour faciliter la communication en équipe et la gestion de projet à distance : https://www.miro.com.
[8] Klaxoon est une plateforme collaborative tout-en-un à l'usage des entreprises : https://klaxoon.com/.
[9] Lisez avec intérêt cet article de Liana Kreamer and Steven G. Rogelberg, chercheurs et professeurs à l'Université de Caroline du Nord Charlotte (2022) : https://scholar.google.com/scholar?q=Kreamer%2C L.%2C %26 Rogelberg%2C S. G. (2020%2C April 29). Break up your big virtual meetings. Harvard Business Review. Available at https%3A%2F%2Fhbr.org%2F2020%2F04%2Fbreak-up-your-big-virtual-meetings. Expérimentez aussi les Liberating Structures, dont beaucoup sont transposables ou adaptables en distanciel : https://www.liberatingstructures.com/.
[10] A la suite des différents confinements, les études sur la popularité du télétravail se sont multipliées. Citons par exemple celle-ci publiée par l’APEC en 2023 : Télétravail des cadres (apec.fr).
[11] La plupart des experts s’accordent sur une longueur comprise entre 30 et 60 minutes, comme le recense le magazine People at Work : https://peopleatwork-mag.com/une-reunion-efficace-cest-quoi/.
[14] OWL Labs publient chaque année un état des lieux du travail hybride à travers le monde : https://resources.owllabs.com/state-of-remote-work.
[15] Lire cet article de JN Bailenson “Nonverbal overload: A theoretical argument for the causes of Zoom fatigue” (2021) : https://scholar.google.com/scholar_lookup?title=Nonverbal overload%3A A theoretical argument for the causes of Zoom fatigue&publication_year=2021&author=J.N. Bailenson.
[16] Voir cette étude de Greenspector (2021), entreprise spécialisée dans la mesure et l’analyse de l’impact environnemental des applications web et mobiles : https://greenspector.com/en/which-video-conferencing-mobile-application-to-reduce-your-impact-2021/.
[17] Pour aller plus loin, lire par exemple cette étude de B. Viererbl, N. Denner et T. Koch “You don't meet anybody when walking from the living room to the kitchen”: informal communication during remote work” (2022), qui insistent sur la nécessité de planifier des sessions d'échanges informels pour les télétravailleurs : https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JCOM-10-2021-0117/full/html.
[18] Article collaboratif de salariés attachés à Microsoft (2022) qui ont analysé l'évolution des données de communication (emails, chat, calendriers..) de plus de 60000 de leurs collègues depuis 2019 et la pandémie de COVID : https://www.scopus.com/record/display.uri?eid=2-s2.0-85114626092&origin=inward&txGid=7ffd2d19374dd5126176fd01ce665690.
[19] Quoique les usages évoluent, les communications asynchrones semblent vouloir s’imposer : pensez par exemple à l’usage grandissant des vocaux dans les conversations par messages instantanés (ex: Whatsapp) : de courts messages vocaux en lieu et place des petits textes habituels.
[20] L’entreprise LifeSize propose plusieurs solutions de visioconférence adaptées au travail hybride : https://www.enghousevideo.com/video-conferencing-solutions/lifesize-cloud-enterprise-meeting-solutions/lifesize-meeting-room-solutions.
[21] Vous pouvez gratuitement créer et tester un virtual office de quelques personnes dans gather.town : https://www.gather.town/. C’est payant au delà.