Les « organisations apprenantes » font parler d’elles. Alors que le déploiement des applications de l’IA Générative dans le monde du travail s’accélère, la question de l’apprentissage continu structuré et organisé tout au long de la vie professionnelle des collaborateurs suscite de plus en plus d’intérêt. Comment les organisations peuvent-elles répondre aux enjeux sociaux et environnementaux de notre temps, avec quelques outils et selon quelles méthodes ? L’entreprise apprenante apporte-t-elle des réponses ? Lesquelles ? Quels sont les défis à relever et les transformations à venir, notamment du fait de l’irruption d’une technologie aussi puissante que l’IA Générative ? En quoi est-ce un prérequis fort pour assurer la pérennité des organisations sur le long terme ?
Dès les années 50, le professeur W. Edwards Deming proposa une alternative au modèle économique dominant d’après-guerre en privilégiant la connaissance, qu'il considérait comme la plus importante ressource d'un pays. Selon lui, la politique d'une entreprise devait être d'augmenter la connaissance des salariés dans un climat de coopération. Les 14 points de Deming qui figurent dans plusieurs de ses ouvrages publiés dans les années 80, sont une préfiguration de ce changement souhaité dans les politiques d’apprentissage au sein des entreprises industrielles dans le but de les rendre plus performantes.
Apprendre régulièrement, accéder à des formations, sont des besoins que chaque personne peut ressentir tout au long de son parcours professionnel. Il s’agit de développer des connaissances et des savoir-faire. C’est aussi un moyen pour accéder à des systèmes de valeurs plus évolués. De la même façon, les organisations qui structurent l’apprentissage pour assurer leur pérennité sur le long terme sont des « entreprises apprenantes ». C’est par exemple un souci constant chez Aneo, que nous mettons en œuvre au travers de mécanismes en perpétuelle évolution.
Il nous apparait aujourd’hui évident que pour résoudre un problème, développer un nouveau produit, ou repenser un processus, il est nécessaire d’étudier l’environnement de l’entreprise, de le comprendre et d’agir en fonction. Les organisations évoluent dans des écosystèmes en constante mutation, notamment du fait d’une quantité toujours plus grande d’acteurs impliqués et engagés - les parties-prenantes - qui prennent des décisions dans des environnements plus complexes. Pour ces organisations, la mise en place d’un système d’apprentissage non seulement à l’échelle des individus mais également à l’échelle de la structure dans son ensemble, est un levier supplémentaire pour gagner en pertinence et en efficacité. L’approche doit être « holistique » et constituer un tout cohérent. Chez Aneo, nous avons mis par exemple en place les “knowledge days” obligatoires pour tous les collaborateurs, ou chacun bénéficiait de formations, de retours d’expérience ou d’ateliers collaboratifs.
Par ailleurs, le désengagement des employés (le phénomène du quiet quitting), la démotivation, le départ de salariés qui ne trouvent plus ou pas assez de satisfaction dans leur emploi peuvent être les conséquences très concrètes du manque de développement professionnel. Des salariés qui ont le sentiment de stagner, du fait d’un manque de connaissances, ou de compétences pour apporter une plus grande valeur dans leur travail auront aussi un impact sur la performance de l’entreprise dans son ensemble.
Aussi, les individus désireux d’apprendre rendent leur entreprise plus intelligente et contribuent à sa croissance. En manifestant un intérêt réciproque pour le développement des compétences de leurs collaborateurs et en créant un écosystème apprenant pour le promouvoir, les entreprises s’assurent in fine des gains de productivité. Par ailleurs, des collaborateurs inspirants qui « performent » à des niveaux élevés, et qui contribuent à stimuler la collaboration et l’innovation à travers les processus mis en place, auront inévitablement un impact sur l’épanouissement d’un grand nombre de leurs collègues. Nous avons par exemple réservé un créneau d’une heure chaque jeudi matin, ouvert à tout collaborateur Aneo pour animer un webinaire sur un sujet de son choix.
Enfin, les recherches montrent que les entreprises pérennes sont celles qui développent des capacités avant d’en avoir besoin, favorisant ainsi la créativité et l’innovation. Et ce sont ces capacités qui s’affaiblissent quand trop de « bons éléments » quittent l’entreprise.
Les défis à relever pour parvenir à mettre en place et à favoriser l'apprentissage continu des salariés dans une organisation apprenante sont multiples. Comme le laissait suggérer le professeur W. Edwards Deming, il s’agit pour beaucoup d’entreprises d’un changement culturel profond : pouvoir passer d’un modèle d’entreprise uniquement centré sur la performance économique à un modèle d’entreprise recherchant aussi une performance sociale voire environnementale. Dans cette perspective, l’engagement des dirigeants est un prérequis fort à la mise en place d’un système d’apprentissage structuré. Comme souvent, sans volonté ni stratégie clairement établies et communiquées, les résistances au changement seront plus vives.
Au défi culturel, viennent s’ajouter d’autres contraintes à la mise en place d’une organisation apprenante. Selon Peter Senge, dans son livre La Cinquième Discipline, les 5 disciplines fondamentales pour créer une organisation apprenante sont :
Selon Senge, ces 5 disciplines permettent de développer trois capacités fondamentales : nourrir l'aspiration, cultiver les conversations réflexives et comprendre la complexité. Elles sont interdépendantes et essentielles pour qu'une organisation devienne véritablement apprenante et s'adapte en permanence
Dans l’entreprise de demain, de multiples études assurent que l’IA Générative contribuera fortement à l’accroissement de la productivité des collaborateurs, tous métiers confondus. Selon une étude conduite par le McKinsey Global Institute en 2023, les gains de productivité liés à l’automatisation issue de l’IA pourraient atteindre jusqu'à 30% d'ici 2030 dans l’ensemble des secteurs de l’économie Américaine.
A mesure que nos interactions avec l'IA vont s'approfondir, nous allons chercher à développer d'autres compétences que des compétences purement techniques ou plus généralement des compétences s’appuyant sur des tâches « facilement automatisables ». Les compétences les plus recherchées seront donc les compétences cognitives et les compétences socio-émotionnelles. Les « humanités » seront au cœur des enjeux de formation. Elles seront les différenciateurs pour le travail créatif et collaboratif.
L'apprentissage tout au long de la vie des individus est donc largement un enjeu de société. On peut imaginer que de nouvelles formes d’apprentissage verront le jour. Les politiques éducatives des Etats associées aux systèmes d’apprentissage de plus en plus sophistiqués mis en place par les entreprises devront permettre de répondre aux besoins grandissant des individus dont les activités économiques adresseront aussi des enjeux sociaux voire environnementaux. Le déploiement de l’IA Générative s’accélérant, il importe désormais pour un nombre grandissant d’organisations de repenser pour mieux les mettre en avant les bénéfices issus des interactions et des liens de collaboration entre les personnes tout en s’appuyant sur la technologie. L’entreprise apprenante permet cela.
[1] Nombreuses ressources disponibles décrivant les 12 principes de Deming, par exemple en français : https://www.les-traducteurs-agiles.org/2011/07/15/les-14-points-de-deming.html.